Les casques (suite)
A partir des Vè et IVè s. av. J.C., l'armement d'abord villanovien assez bien documenté évolue surtout au contact des Grecs et l'on voit se généraliser le casque à cimier(en crin de cheval) propre à la tenue hoplitique.
Statuette en bronze (Vè s. av. J.C.) en provenance d'Ombrie. Villa Getty à Malibou, Californie.
Complément d'armement
La décoration de bon nombre de tombes mais aussi de céramiques, de figurines en bronze ou en terre cuite de toute époque permet de reconstituer en partie la tenue du soldat étrusque.
Il n'est pourtant pas facile de suivre son évolution dans sa spécificité d'autant plus que l'influence grecque s'affirme progressivement. Le guerrier étrusque des VIè, Vè et IVè siècles n'est pas très différent de l'hoplite grec. Les casques à cimiers en crin de cheval sont un repère presque chronologique. Mais il existe bien d'autres types de casques étrusques à ces époques.
Quel était alors en général, l'armement de l'hoplite ?
Un casque en bronze, un glaive, une lance, un bouclier, une cuirasse, des cnémides...Un armement lourd où le bronze prédomine (vu sa résistance supérieure à celle du fer). Une silhouette militaire bien connue qui n'évoluera que très lentement au fil des conquêtes et dont le prestige influencera les Etrusques et même les Romains (du moins au début...)
Cuirasses et casques étrusques
Galerie de bronzes étrusques guerriers....
Les chars
Du VIIIè au IVè s. av. J.C., la plupart des chars de guerre étaient enterrés dans les sépultures des membres de l'élite étrusque; ils constituaient l'un des plus visibles de leur prestige social et politique au même titre que les trônes, les accessoires des banquets et les services de symposium. Plus que des chars de guerre, des chars d'apparat et de cérémonie...
Avec le déclin des clans aristocratiques, cette coutume d'enfouir les chars a cessé. On en retrouvé dans des tombes du VIIè s. av. J.C. à Populonia, à Vétulonia, à Marsiliana, à Caere-Cerveteri et à Castel San Mariano (char féminin trouvé en 1812 dont les restes ont été dispersés par des collectionneurs entre Paris, Berlin, Munich et Pérouse...)
Depuis le XVIIIè siècle, les restes de 300 chars ont été découverts en Italie dont la moitié dans les tombeaux princiers mais très peu sont complets.
Le plus célèbre des chars étrusques a sa propre histoire: c'est le char dit de Monteleone...
Char funéraire de Monteleone di Spoleto (VIè s. av. J.C.) Photo de Peter Zeray du Photograph Studio, MMA
C'est un char funéraire trouvé en 1902 dans une sépulture d'un terrain privé à Monteleone di Sporeto (Province de Pérouse en Ombrie). Expertisé et restauré, il est actuellement encore au MET. de New York.
Découvert par un paysan, il a été finalement vendu aux Américains à Florence en 1903 et exporté d'Italie illégalement. La commune de Monteleone n'expose donc qu'une copie ! (Eternel problème de la restauration et de la préservation des pièces archéologiques sauvegardées à l'étranger...)
Les équipes d'experts du MET. ont restauré au fil des années cet artefact de belle taille; le dernier Journal du musée concernant leur travail d'analyses et de recherches documentaires est paru en 2011 sous la direction d'Adriana Emiliozzi.
Pour le détail, je recommande vivement la consultation en PDF du rapport complet en anglais avec de belles photos très éloquentes du travail d'analyse et de restauration des équipes du musée :
https://www.academia.edu/4966224/The_Etruscan_Chariot_from_Monteleone_di_Spoleto
Capture d'un plan de situation extrait du PDF (Dessin d'Angiolo Pasqui en 1907)
La sépulture était au sommet d'un tumulus que le propriétaire-découvreur avait entrepris d'araser pour libérer de l'espace devant sa maison... Le chariot se trouvait dans une tombe au milieu d'autres artefacts (chaudrons et vaisselle bronze, ossements).
A la lecture du rapport, on apprend qu'il s'agissait d'un char à deux roues avec timon pour un attelage de deux chevaux; la décoration superbement restaurée de l'ensemble du tablier (partie centrale et latérales) est assez stupéfiante par la qualité technique des représentations en repoussé sur les plaques en bronze incrustées partiellement d'ivoire.
Les photos qui agrémentent le commentaire du rapport permettent d'appréhender la qualité du travail des artisans en toreutique qui ont réalisé cette pièce d'exception : un char de guerre prestigieux d'époque archaïque et d'inspiration ionienne.
Recouvert et orné de plaques en bronze, le char présente un tablier en triptyque avec reliefs évoquant des scènes en trois épisodes de la vie épique d'Achille et de son apothéose. Personnage mythique récurent et révéré des élites guerrières étrusques, Achille est un modèle éminent parfaitement en accord avec l'idéal, les références et les valeurs de l'aristocratie étrusque de l'époque.
Quels personnages identifiés sur ces reliefs ?
Essentiellement, ceux de l'Iliade : épopée mythologique d'Homère (VIIIè s. av. J.C.) narrant les dix dernières années de la guerre de Troie
Partie centrale :
Achille et sa mère Thétis debout, tenant un casque à tête de bélier, de part et d'autre d'un grand bouclier orné d'une gorgone et d'une panthère.
Voir cette autre illustration de l'épisode sur céramique :
Sur les parties latérales :
Achille combattant Memnon ("celui qui tient bon", tué par Achille); Antilochos (ami d'Achille, tué par Memnon); Polyxena (princesse troyenne, fille de Priam et d'Hécube, aimée d'Achille mais immolée par les Grecs à la mort du héros); Chiron (sage centaure précepteur d'Achille); Iris (messagère des dieux); les deux chevaux d'Achille : Balios et Xanthos...
Remarque :
Rien de spécifiquement étrusque dans cette ornementation de char du VIè s. av. J.C. , époque d'épanouissement artistique, d'expansion maximale du rayonnement de cette civilisation...Constat évident de l'ascendance rémanente de l'influence grecque avec sa mythologie prégnante, omniprésente....C'est ce même constat auquel étaient parvenus des savants, pionniers de l'archéologie comme Winckelmann (XVIIIè s.) ou Raoul-Rochette (XIXè s.)...
En fait, rien de commun non plus avec l'art de la guerre....
Le char d'Ischia di Castro (près de Vulci (province de Viterbe) dans la tombe du Bige
Des archéologues belges en 1967 ont retrouvé dans le long vestibule d'une tombe du VIè s. av. J.C. un autre char de parade plaqué de bronze avec les squelettes de chevaux...)
Le dromos à ciel ouvert de la tombe du Bige où se trouvait le char enterré...(Photo Canino info)
Le char exposé au musée Rocca Albornoz de Viterbe.
C'est un char de défilé ou de parade, objet de prestige dans les sépultures aristocratiques...
(Infos complémentaires contenues dans la seconde partie de l'étude du Met. de N.York sur le char précédent)
Ajoutons que les chars disparaîtront avec l'évolution des techniques guerrières : instrument de prouesses individuelles, il sera remplacé par la cavalerie manoeuvrant en formations serrées...
La défense militaire des ligues étrusques
Comme la ligue des villes ioniennes en Asie mineure, la confédération des douze peuples unis par une solidarité politique et religieuse a parfois réussi à associer leurs forces militaires dans des entreprises communes (voir leur expansion territoriale pour intérêts commerciaux) mais en réalité une grande diversité semblait régner d'une cité à l'autre et leurs dissensions expliquent, en partie, la perte de leur hégémonie sur terre et sur mer. Par ailleurs, il est impossible d'évoquer un modèle militaire étrusque pour l'ensemble de l'Etrurie. Les cités n'avaient pas toutes des citoyens-soldats; pas d'armée civique donc...Certaines engageaient des mercenaires, d'autres ne semblaient pas même concernées par les guerres. Les grandes familles engageaient et payaient leurs "clients" ou recrutaient des professionnels à l'extérieur selon l'implantation des cités...Bref, toutes les références aux valeurs guerrières contenues dans leurs hypogées paraissent parfois convenues, artificielles voire très marginales...
Si la valeur guerrière n'avait pas la primauté chez les Etrusques, l'histoire de leur disparition montre qu'ils ont eu bien des combats à mener contre tous ceux qui convoitaient leurs richesses. De plus, leur destinée ne leur accordait que dix siècles d'existence...