Vu le temps que la recherche archéologique a consacré pour reconnaître et découvrir la civilisation étrusque (depuis le XVIIIè siècle...), on ne s'étonnera pas d'avoir eu si peu d'informations sur les civilisations qui les côtoyaient.
Ce n'est vers les années 70/80 et plus récemment (années 2000) que nous sont parvenus des rapports de fouilles archéologiques italiennes et internationales sur des lieux dispersés, révélant de nouvelles ethnies avec parfois leurs alphabets, leurs religions aux divinités méconnues, quelques artéfacts essentiellement influencés par les Etrusques et par la présence des Grecs du sud et de Sicile.
On peut regretter que la diffusion de ces nouvelles informations soient transmises, me semble-t-il, au compte-gouttes pour le grand public, par prudence scientifique certes mais aussi par un manque de synthèse encore évidente aujourd'hui. Les réserves des musées sont pourtant riches en dépôts attendant d'être exploités, interprétés et exposés. Pourtant, loin d'être indifférents à la condition et à l'histoire de ces peuplades italiques de l'antiquité nos contemporains sont toujours à l'affût des nouvelles découvertes qui enrichissent la quête de leurs racines européennes.
Je me souviens d'avoir visité en 1981 aux Musées Royaux d'Art et d'Histoire de Bruxelles une remarquable exposition (Europalia 80) intitulée :
PRIMA ITALIA
Arts italiques du premier millénaire avant J.C.
Celle-ci, organisée par les Surintendances archéologiques italiennes qui avaient prêté des oeuvres de nombreux musées, illustrait clairement la nouvelle orientation des études et de la recherche étrusques impulsée par Massimo Pallotino à savoir l'idée d'une certaine communauté de culture vécue par les populations italiques depuis les temps les plus anciens. Je le cite : " De nouvelles orientations méthodologiques nous portent à une confrontation directe - pour ce qui est de leur formulation et de leur contenu - entre les inscriptions étrusques et latines, ou italiques, ou grecques, ouvrant à la recherche une infinité de possibilités nouvelles."
Quarante ans plus tard, ce que l'on sait aujourd'hui de l'histoire des peuples italiques (ou italiotes) constitue un vaste corpus linguistique, archéologique, ethnographique en grande partie accessible bien que complexe et difficile à appréhender dans son ensemble.
Dès les années 50, un linguiste français, spécialiste de langues proto-méditerranéennes, Michel Lejeune (1907-2000) s'était déjà aventuré à déchiffrer quelques inscriptions mycéniennes (en Grèce), étrusques, samnites (Pietrabbondante), lucaniennes (Rossano di Vaglio), osques (Saepinium et Capoue), vénètes, contribuant à mettre en lumière les systèmes d'écritures de ces peuples indigènes. Nous le retrouverons dans sa quête des identités italiques.
Cartes de l'Ombrie antique (Herck, 1832) et moderne
Les 3 cartes ci-dessus permettent de situer l'Ombrie et les territoires environnants dans l'antiquité et sa surface restreinte aujourd'hui.
Occupant une zone au Nord, vers la région padane, à l'Est vers les Apennins et l'Adriatique, au Sud à la limite du Tibre, à l'Ouest vers la Tyrrhénienne, les Ombriens, reconnus comme indo-européens étaient présents depuis le IIème millénaire, donc bien avant les Etrusques. Ils comprenaient aussi les Sabins et les Picéniens.
Peu à peu leur territoire initial se rétrécira au profit des peuples voisins devenus menaçants, à commencer par les Etrusques (à l'Ouest), les Gaulois au Nord, les Picéniens à l'Est et les Sabins au Sud.
Les Etrusques avec leur forte personnalité et leur emprise commerciale, les ont assimilés jusqu'à l'arrivée des Romains au IIIè s. av. J.C. Ils avaient pourtant édifié des cités aux murailles célèbres comme à Pérouse (Perusia), à Orvieto (Volsinii) proche du Fanum Voltumnae, lieu sacré de rencontres des confédérations étrusques...( cf. les articles de février-mars 2017 sur la ville de Pérouse : la zone archéologique, le Cippe et son inscription, la ville d'Orvieto...)
Citons aussi Rimini, Ravenne, Mantoue, Cortone, Assise, Todi, et Gubbio, hauts lieux de tourisme aujourd'hui...
Les Tables Eugubines
La ville de Gubbio (Engubium) justement a fourni un ensemble de tables en bronze de tailles différentes, écrites en alphabet ombrien (du IIIè s. av. J.C) et en caractères latins ( du Ier s. av. J.C.), écrit de droite à gauche comme l'étrusque.
Il s'agit de 7 plaques de bronze présentant 12 faces d'écriture qui décrivent les rites de cérémonies religieuses lors des fêtes : les "Bimestriels" et les "Céréales"; une sorte de "bréviaire" à l'usage des prêtres...
Bien que 4365 mots aient été traduits, le sens de certaines phrases reste obscur. L'alphabet comporterait 14 consonnes, 4 voyelles (pas de "O"). (Informations de l'Association "Eugubini nel mondo) . Longue est la liste des spécialistes qui se sont attaqué au déchiffrement de ce remarquable et rare document qui a servi aussi à préciser la traduction de certains mots étrusques. Citons au moins ERNOUT : Le dialecte ombrien. Lexique du vocabulaire des Tables Eugubines et des inscriptions,1963 .
A SUIVRE